Voici les raisons selon lesquelles l’avant-projet de nouvelle Constitution haïtienne ne passera pas !

À première vue, il semble évident que ce projet n’a aucune chance de triompher en Haïti, par les temps qui courent.

Ses adversaires sont puissants, organisés, bruyants. Ils occupent les plateaux médiatiques, dominent les réseaux d’influence, manipulent l’opinion, travestissent le débat. Ils affirment, avec aplomb, que ce texte serait antidémocratique, inapplicable, dangereux. Ils crient au complot, dénoncent un supposé recul, jurent fidélité à une Constitution de 1987 qu’ils ont pourtant maintes fois piétinée. En surface, tout porte à croire que cet avant-projet est condamné à mourir dans les flammes des passions partisanes.

Et pourtant. C’est précisément parce qu’il est audacieux, structurant, et potentiellement libérateur qu’il dérange autant. Car sous leurs vociférations, ce que redoutent réellement les détracteurs de ce projet, ce n’est pas son échec, mais bien son succès.

Ce texte — que d’aucuns veulent enterrer avant même qu’il ne vive — porte en lui une promesse : celle de refonder l’État haïtien sur des bases modernes, décentralisées et inclusives. Ses propositions ne sont pas des caprices technocratiques, mais des réponses lucides à des blocages systémiques. Pourquoi donc tant de haine, de calomnies, de manipulations autour d’un texte qui ose rêver d’un avenir meilleur ?

La réponse est simple : on ne change pas ce qui est à son avantage, peu importent les dégâts sur la société. Les bénéficiaires de l’ancien régime, habitués aux privilèges sans contrepartie, aux immunités sans devoirs, sentent que ce texte pourrait signer la fin de leur ère.

Les moines du système politique traditionnel — ministres véreux, parlementaires inutiles, gardiens d’un ordre établi fondé sur le clientélisme et l’impunité — sortent de leurs retraites dorées pour défendre leurs bastions. Ils se mobilisent dans les médias de l’oligarchie, font la tournée des tribunes financées, brandissent des arguments aussi usés que leur modèle de gouvernance.

Pourtant, que propose donc ce texte pour susciter autant de peur ?
– Une véritable décentralisation budgétaire, brisant la centralisation étouffante de Port-au-Prince ;
– La remise en cause de la gérontocratie au profit de nouvelles générations compétentes ;
– L’auto-détermination des communes et des départements, gage d’une démocratie de proximité ;
– L’encadrement strict du parlementarisme haïtien, souvent otage de l’inefficacité ;
– Le renforcement juridique de la présidence, désormais comptable de ses actes ;
– La reconnaissance constitutionnelle des droits politiques de la diaspora ;
– La désignation officielle d’un chef de l’opposition pour structurer la vie politique ;
– L’instauration d’une loi sur la transparence du financement des campagnes électorales.

Ces réformes sont-elles vraiment antidémocratiques ? Ou bien constituent-elles plutôt une menace pour ceux qui profitent depuis trop longtemps d’un système corrompu, déséquilibré et bloqué ?

Il suffit de lire certains éditoriaux pour comprendre les intérêts en jeu. Frantz Duval, dont l’influence éditoriale se confond avec les intérêts bancaires d’un petit cercle, vilipende le texte. Jerry Tardieu, rescapé de la « Législature de la honte », fait chorus avec Pierre Agénor Cadet, fossoyeur de l’éducation nationale. Tous ont à perdre dans une nouvelle architecture politique fondée sur la compétence, la redevabilité et la transparence.

Leur hypocrisie éclate au grand jour. Car ce qu’ils reprochent au texte d’aujourd’hui, ils le reprochaient déjà à celui de 2021. La continuité de leur hostilité prouve que ce n’est pas le contenu qui les dérange, mais le changement lui-même. Leur posture n’est pas idéologique, elle est défensive, réactionnaire, corporatiste.

Il faut donc le dire avec force : les ennemis de ce texte sont les ennemis du progrès. Ils préfèrent l’immobilisme, la décadence organisée, l’État failli, à la perspective d’une République renouvelée. Et pourtant, ce projet est peut-être l’une des plus audacieuses propositions constitutionnelles depuis la chute des Duvalier. Il consacre 4 % du PIB à l’éducation, donne une représentation politique à la diaspora, institutionnalise la décentralisation, crée un gouvernorat régional : des mesures structurantes, visionnaires, courageuses.

Mais voilà, ceux qui rêvent de résurrection politique sur les ruines de la République craignent cette refondation. Ils ne veulent pas d’un État fort et juste, ils veulent un État captif. Leur discours est une imposture. Leur opposition est une imposture.

Qu’ils aillent donc hurler ailleurs. L’Histoire jugera. Le peuple tranchera.

Et, pendant que les fossoyeurs de la République conspirent, la nation, elle, espère.

Dr Michélot Oxil, PHD.