« Poudrière à nos portes : trahisons silencieuses et perfidie diplomatique »

Ameriqueinfo7

La récente révélation faite par la journaliste dominicaine Iluminada Muñoz plonge une fois de plus la frontière haïtiano-dominicaine dans une lumière crue. Onze membres de la police nationale dominicaine ont été arrêtés pour leur implication présumée dans un réseau clandestin de vol et de vente de munitions. Ces dernières, extraites des dépôts de l’institution, auraient été revendues à des particuliers, dont certains affiliés à des gangs haïtiens. Un commerce lucratif et mortifère, orchestré à l’ombre des lois internationales et des valeurs humaines.

Cette opération illégale n’est pas un simple acte isolé d’individus corrompus. Elle s’inscrit dans une mécanique plus vaste, où des nations prétendument garantes de la stabilité régionale, comme la République dominicaine et les États-Unis, participent indirectement ou directement à l’armement de factions déstabilisatrices en Haïti. La frontière commune devient une artère par laquelle transite une violence nourrie par l’appât du gain et l’absence totale de scrupules.

Une hypocrisie internationale manifeste

La République dominicaine, tout en affichant une posture rigoureuse contre l’insécurité à ses frontières, semble tolérer en coulisse des activités qui alimentent le chaos chez son voisin. De son côté, Washington, bien qu’engagé dans des discours sur la paix et la démocratie, ferme les yeux sur le cheminement incontrôlé de ses armes en Haïti. La Convention de Genève de 1949, pourtant claire sur la responsabilité des États dans la prévention des conflits armés, semble ici reléguée au statut de simple formalité administrative.

Les États-Unis ont contribué à la dissolution des Forces armées d’Haïti en 1994, sous prétexte de leur implication dans des coups d’État. Pourtant, aucune armée de substitution, basée sur une doctrine démocratique, n’a été créée. Ce vide stratégique a permis l’émergence de réseaux illicites, facilitant le trafic d’armes à travers les frontières. Avant cette date, Haïti ne connaissait pas un tel flux d’armes. Les autorités haïtiennes, piégées par des intérêts étrangers, ont laissé le territoire vulnérable, ouvert aux trafics destructeurs favorisés par une absence totale de défense nationale.

Les autorités haïtiennes : spectatrices aveugles de leur propre effondrement

Pendant ce temps, Haïti, incapable de protéger ses frontières ou de réguler son territoire, se trouve pris dans un piège mortel. Les autorités locales, gangrenées par des décennies de mauvaise gouvernance et d’abandons successifs, n’ont jamais mis en place de véritables stratégies de défense territoriale. Cette passivité alimente l’impression d’un État fantôme, où les criminels dictent les règles.

Les faits troublants

Les munitions retrouvées entre les mains des gangs haïtiens portaient des emballages identifiant clairement leur provenance : les dépôts de la police nationale dominicaine.

Cette preuve matérielle a été suffisante pour déclencher une opération visant à démanteler le réseau criminel en République dominicaine. Parmi les arrestations, figurent des officiers de haut rang, tels que le colonel Narciso Feliz Romero et plusieurs capitaines. Ces hommes, censés protéger leur pays, ont préféré trahir leur serment pour enrichir leurs poches.

Une complicité régionale organisée et structurée

Le trafic d’armes sur la frontière haïtiano-dominicaine est bien plus qu’un problème local. C’est une illustration parfaite d’un désordre organisé à l’échelle régionale. Les États-Unis, principal fournisseur d’armes légales ou détournées dans cette partie du monde, continuent à alimenter une machine infernale sous couvert de business international. Chaque munition, chaque arme, vendue ou détournée, devient un outil de mort pour des communautés haïtiennes déjà exsangues.

Questions brûlantes

Comment la République dominicaine peut-elle prétendre vouloir la stabilité régionale tout en permettant à ses propres forces de l’ordre de trahir la sécurité publique ? Pourquoi les États-Unis, avec leurs discours moralisateurs, n’imposent-ils pas un contrôle plus strict sur les flux d’armes ? Et enfin, comment Haïti, au bord du gouffre, peut-elle rester spectatrice de sa propre décomposition sans mettre en place un système de défense minimal ?

Les responsabilités sont multiples, les victimes innombrables, et les réponses toujours absentes. Combien de temps encore ce théâtre macabre continuera-t-il à se jouer sous les yeux du monde entier

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